Rock-Lobotomie, 4e partie. «Éternellement jeunes, éternellement saouls»

Vassia Lojkine - LOciident nous aidera

Note du traducteur : Le délai qui s’est écoulé entre la publication de cette quatrième partie de la série « Rock-lobotomie » et la précédente s’explique par deux circonstances : premièrement, je ne me suis pas rendu compte, lors de mes premières recherches, de l’existence de cette quatrième partie, à cause du titre formulé de manière différente (« Лоботомия в стиле рок » au lieu de « Рок-лоботомия »). Deuxièmement, même après avoir découvert son existence, j’ai hésité à en publier la traduction car elle doit s’accompagner, comme qui dirait, d’un trigger warning : Konstantin Siomine, comme beaucoup de marxistes de la Russie contemporaine – la majorité, aurais-je envie de dire – est adepte d’une conception de la question des minorités sexuelles que je jugerais d’archaïque, et son propos le reflète.

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Strannye Igry – Les jeux étranges de la skadaptation (de Queneau à Madness en passant par Brassens)

Sur l’emblématique compilation Red Wave: 4 Underground Bands from the Soviet Union, derrière les trois mastodontes du rock’n’roll soviétique – Aquarium, Alissa, Kino – il y avait un petit groupe aujourd’hui largement oublié : Strannye Igry (littéralement « Jeux étranges »). Les raisons de l’oubli sont assez simples : en 1986, à la sortie de la compilation susnommée, le groupe se séparait en deux nouvelles entités, les groupes AVIA et Igry, qui ne connaîtront pas de succès populaire malgré des carrières prolongées.

Leningrad / Nestchastnyï Sloutchaï – «Élections, élections…»

Ça fait un bout de temps que j'ai renoncé à essayer de commenter régulièrement les actualités politiques et sociales russes : je ne le faisais avant, déjà, qu'aux très grandes occasions où j'estimais que je pouvais ajouter un point de vue un minimum original (dans la sphère francophone, du moins) et souvent, en réalité, ça se résumait à du sarcasme et des railleries pas très habiles qui ont, en plus, fini par se tarir.

Mike Naoumenko – «Rastafara (Natty Dreada)»

La condamnation de l'appropriation culturelle en vogue à notre époque aurait probablement bien fait rigoler Naoumenko et ses complices de la scène rock soviétique. Le premier hit de Mike sera « Saloperie », qui s’approprie le riff de « Baby Face » de Lou Reed, et toute sa carrière sera marquée par les sonorités blues, rock et punk occidentales à peine altérées. Et si il s'applique, dans ses textes, à décrire de la manière la plus désabusée et directe les réalités de la vie en URSS, il pioche, comme la plupart, dans le folklore non seulement local, mais international.

Tchaïf – « Argentine – Jamaïque 5:0 »

Lors de la Coupe du monde de football de 1998, alors que la Russie n'avait pas réussi à se qualifier pour le premier tour, les spectateurs du pays ont bien dû se trouver d'autres équipes à soutenir. Outre les éternels «frères slaves» et apparentés (Yougoslavie, Croatie, Roumanie), quelques Russes ont un faible pour l'équipe de Jamaïque, qualifiée pour la première fois de son existence. Les espoirs des Jamaïcains seront hélas mis à mal par ces même frères slaves (les Croates) dès le premier match, et anéantis lors du deuxième match contre l'Argentine, qui s'achèvera sur le score annoncé dans le titre dans ce billet.

Cannes, Kino, le cinéma, Serebrennikov, l’Été et des navets guerriers

Après une longue pause et une série de traductions et de billets plus ou moins détachés de l'actualité, j'essaye de rattraper les dépêches de mon fil Twitter, et voilà que je tombe, bien opportunément, sur Cannes, Serebrennikov et son «Été», une occasion pour moi de parler (une fois de plus) des personnages dépeints par son film et, comme d'habitude, de finir par divaguer sur des trucs qui n'ont pas beaucoup de rapport.

Articles fantômes, humour douteux, et Daniil Harms contre le pistolet Makarov

Dans la langue russe, malgré ses mécanismes parfois remarquables (ah ! ces verbes de mouvement !) et son vocabulaire fleuri, il y a une nuance qui se perd presque totalement : celle des articles, pour la simple et bonne raison qu'ils n'existent pas. J’aime l’illustrer par cette vielle blague où Pét’ka, jeune recrue de l’Armée Rouge, demande au légendaire commandant Vassili Tchapaïev la signification du mot « nuance ».

Lyapis Trubetskoy – «Manifest»

C'est toujours pareil, à chaque fois que je me remets à commenter l'actualité de la Russie contemporaine. Il y a un moment d'excitation devant cette vie politique tellement plus burlesque, tellement plus entraînante que le mollasson «débat démocratique» que l'on nous sert en Occident. Puis, je me rappelle que ce sont des gens qui subissent ce capharnaüm tous les jours et, devant l'absurdité et la fatalité, des fois, les mots m'en manquent, les bras m'en tombent.

DDT – «Terroriste»

J'me retourne : tout est calme. Personne derrière.
Le puits d'une cour. Un trou : l'entrée de service.
C'est cloué ! Le diable emporte cette lumière
Qui se colle par-dessus comme une flaque de pisse.

Une échelle de secours rouillée et fragile,
Bordée de fenêtres, mais c'est la seule issue.
Les étages s'égrènent, d'une lenteur assassine,
Dépassés par des mains tremblantes et fourbues.